Il est fréquent à Liège et dans sa région, à la Belle Époque, de trouver par hasard des foetus ou des cadavres de bébés, qu’il s’agisse de mort-nés ou de victimes d’infanticide, flottant sur la Meuse ou abandonnés en divers endroits, comme en témoigne le journal La Meuse : un était caché sous une poignée d’herbes à Barchon, un autre enveloppé dans un vieux jupon de femme gris soutaché de noir, abandonné dans un jardin de la rue du Val-Benoît, un autre encore retrouvé dans un urinoir de la rue de la Halle, enveloppé dans de l’ouate et un morceau de toile bleue, le tout emballé dans du papier journal, ou encore à l’entrée de l’église Sainte-Foy, enveloppé dans du linge, élément qui permit à l’officier de police d’authentifier la mère coupable.
Voici quelques autres exemples pour le début du XXe siècle :
Vendredi matin, une infirmière de l’hôpital de Bavière aperçut dans le jardin de cet établissement, le long du grillage du quai de la Dérivation, un paquet enveloppé d’un vieux morceau de toile. Quel ne fut pas son émoi, en l’ouvrant, d’y trouver un cadavre de nouveau-né ! La police de la 6e division a prévenu le Parquet de cet infanticide.
Des gamins jouaient rue Dehin quand l’un d’eux donna un coup de pied dans un sachet qui, en se déchirant, mit à découvert un foetus. Transporté aux bureaux de police de la 4e division, M. le docteur Fumet l’a examiné et a conclu que ce foetus avait quatre mois de gestation. Il a été transporté à la morgue. Une enquête est ouverte.
Vers 7 heures, un garde-route a trouvé dans le tunnel de Liège-Palais, à Jonfosse, un paquet très bien enveloppé. Le garde l’ouvrit et se trouva en présence d’un foetus, qu’il porta à la gare du Palais. Un docteur a constaté qu’il avait environ cinq mois de gestation.
Une habitante de la rue Pont-d’Avroy s’était rendue dans son grenier pour chercher un objet placé sous une poutre, quand elle découvrit un foetus desséché qui devait être caché là-dessous depuis plusieurs mois. Le foetus a été transporté à la morgue. Une enquête a été ouverte par la 2e division de police.
Dimanche, sur la berge de la Meuse, des pêcheurs trouvèrent un paquet volumineux, rejeté par un remous sur la rampe. Ils déficelèrent le paquet, qui contenait le tronc et la tête d’un enfant paraissant avoir vécu huit ou dix jours. Les bras et les jambes avaient été détachés du corps par des incisions nettes.
Le jour de l’Assomption, on a découvert un paquet flottant sur le fleuve à hauteur du quai Sainte-Barbe. Il s’agissait d’un enfant né à terme et viable, enveloppé d’un linge entouré d’une corde à laquelle une brique était attachée…
Un foetus a été découvert dans la boue, place Delcour.
Le phénomène récurrent est d’abord la rançon de la misère matérielle et morale de mères célibataires, incapables financièrement d’élever un gosse, ou un de plus. Bien souvent, il s’agit de servantes qui risquent de perdre leur place si leurs maîtres se rendent compte de leur grossesse.