Le gaz de ville de Minckelers
Si nos villes ont été parmi les premières à être éclairées, si les premiers aérostiers ont réussi à faire voler leur ballon, Jan-Pieter Minckelers n’y est pas étranger. Ce pharmacien, originaire de Maastricht a, en effet, inventé le gaz de ville.
Jusqu’à la Révolution française, Maastricht faisait partie de la Principauté de Liège. On peut donc considérer que ses natifs sont, sur un plan géographique, belges. D’ailleurs, Jan-Pieter Minckelers se considérait de la sorte. Né à Maastricht en 1748, issu d’une famille de médecins et de pharmaciens, il reçoit une solide formation au collège jésuite de sa ville natale avant de rejoindre Liège, puis Louvain pour poursuivre ses études de philosophie et de théologie. Il se destine à la prêtrise. Le 22 décembre 1770, il reçoit d’ailleurs, à Liège, le sous-diaconat. Un an plus tard, il devient néanmoins professeur de philosophie, mais aussi de logique, de physique et de métaphysique au prestigieux Collège du Faucon à l’Université de Louvain.
C’est dans ce cadre qu’il rencontre, en 1783, Louis- Englebert, sixième duc d’Arenberg. Celui-ci a demandé à trois professeurs de Louvain de rechercher des gaz à partir de la combustion de différentes matières dans le but de trouver celui qui est le moins cher et le plus efficace pour faire voler des ballons. Minckelers va trouver un gaz de houille, quatre fois plus léger que l’air.
Dans son « mémoire sur l’air inflammable tiré de différentes substances », il écrit : « Ayant mis de la houille en poudre dans un canon de fusil, j’ai obtenu de l’air inflammable en abondance et très promptement. »
D’Arenberg est enthousiaste. Car le gaz découvert par Minckelers est plus commode et moins dangereux que l’air chaud jusqu’alors utilisé par les aérostiers. Le 16 novembre 1783, soit quatre mois à peine après le premier vol des frères de Montgolfier, un certain F. Dey s’envole, avec succès, dans un ballon gonflé au gaz de houille. L’expérience se fait à Heverlee, près de Louvain, sous le regard de Louis-Englebert d’Arenberg qui a, probablement, financé les recherches. Ce dernier est à ce point convaincu de la commodité de la trouvaille de Minckelers qu’il décide, à son tour, de tenter l’aventure. Elle a lieu, avec le même succès, le 21 novembre 1783.
Mais Minckelers a une autre idée. Son gaz de houille est non seulement inflammable mais aussi éclairant. Il décide de l’utiliser pour alimenter une lampe. L’effet est saisissant. La luminosité offerte par son gaz est sans commune mesure avec celle proposée, jusqu’à présent, par les lampes à huile et autres chandelles. Il vient donc d’inventer le gaz d’éclairage, dit gaz de ville. Quelques années plus tard, Londres est la première ville à être dotée d’un éclairage public. Même s’il ne put jamais s’en rendre compte, les travaux de Minckelers n’y sont pas étrangers.
La Révolution brabançonne va d’ailleurs mettre fin à ses recherches. Il retourne à Maastricht où il reprend la pharmacie familiale. Pour ce faire, il est même obligé de repasser des examens. À 56 ans. Mais il ne se contente pas de tenir l’officine de son père. Sa cité natale fait très vite appel à ses qualités pédagogiques. Il participe ainsi au lancement de l’école centrale de Maastricht où il enseigne la physique et la chimie. Ses amis scientifiques bruxellois ne l’ont pas oublié. Le 3 juillet 1816, il est nommé membre de la prestigieuse Académie royale des sciences et belles lettres. Il décède le 3 juillet 1824. Aujourd’hui encore, une statue le représentant, une flamme à la main rappelle sa mémoire dans le centre de Maastricht.