Léon Jules Trésignies « Trésignies, nous te suivons »

Léon Jules Trésignies « Trésignies, nous te suivons »

Léon Jules Trésignies naît en 1886 dans le petit village de Bierghes, aujourd’hui repris dans l’entité de Rebecq, dans la province du Brabant wallon.

Été 1914 : l’Allemagne est à nos portes, la mobilisation décrétée. Léon Trésignies qui, à 28 ans, travaille comme ouvrier au chemin de fer, est marié et père d’un petit garçon. Il reçoit son ordre de rejoindre le dépôt du 2e Régiment de Chasseurs à Pied à Kontich puis à Perwez. Là, il est incorporé à la 2e compagnie du 3e bataillon.

Le 20 août, ce qui reste de notre armée belge après les batailles de Liège, de Haelen et de Namur, doit battre en retraite vers la forteresse d’Anvers, notre «réduit national», un réseau de fortifications et de positions défensives autour de la ville d’Anvers qui était considérée comme imprenable et où nous pouvions attendre l’aide de nos alliés.

Le 26 août, le peloton auquel appartient Léon Trésignies et qui est commandé par le 1er sergent-major Wéry marche vers Anvers. Arrivé au lieu-dit Verbrande-Brug (Pont-Brûlé) près de Grimbergen, il voit son avance stoppée. Le pont-levis permettant de franchir le canal reliant Bruxelles à Willebroeck est relevé, interdisant tout passage.

Les ordres sont formels ; il faut traverser et continuer. Coûte que coûte, on doit parvenir à abaisser le pont-levis même si la manivelle commandant son mouvement se trouve sur la rive opposée, occupée par les Allemands.

 Le chef du détachement demande s’il y a un nageur parmi ses hommes. Demande qui, à l’époque, n’est pas du tout saugrenue, peu de personnes se baignaient et donc celles qui savaient nager étaient très rares. Léon Trésignies n’hésite pas longtemps, il sait nager. Il se redresse et se porte volontaire.

Juste avant de glisser dans l’eau, il demande un bout de papier et rédige avec un maximum de soin un petit mot pour sa femme : « Adieu, c’est pour le Roi ». Il sait à ce moment que ses chances de survivre à l’opération sont quasi nulles. Parvenu sur l’autre rive, il se faufile vers la manivelle. Malheureusement, il ne sait pas dans quel sens la faire tourner pour faire descendre le tablier et, comble de malchance, il commence par l’actionner en sens inverse ce qui a pour effet de relever encore plus le tablier.

Ses compagnons sur l’autre rive l’appellent pour lui signaler son erreur. Leurs cris attirent évidemment l’attention des soldats allemands qui, immédiatement conscients du danger, se mettent à faire feu de toutes leurs armes sur Trésignies. Ce dernier, stoïque, bien qu’atteint à plusieurs reprises, n’en continue pas moins de pousser sur la manivelle, cette fois-ci dans le bon sens.

Mais il est une cible idéale et les blessures s’ajoutant aux blessures, il finit par s’écrouler mortellement atteint sans être parvenu à baisser le pont complètement. Le 26 août 1914, Léon Trésignies, caporal depuis quelques minutes, n’est plus.

Certains ont voulu mettre en doute la reconnaissance apportée au valeureux caporal parce que, pour eux, sa mission fut un échec. Ils oublient que ce qui valu à Trésignies d’être considéré comme un héros, ce n’est pas d’avoir réussi ou échoué, mais de s’être, sans sourciller, porté volontaire pour une mission dont il savait qu’il avait très peu de chances de revenir.

Cela n’empêche heureusement pas Léon Trésignies d’être célé- bré comme un « héros national ». Le 15 septembre 1914, il est cité à l’Ordre de la nation par le roi Albert Ier, en ces mots : « L’Armée salue un courage d’une simpli- cité héroïque », et « a honoré son Régiment, l’Armée et la Nation ».

La devise du 2e Régiment de Chasseurs à Pied, dissous le 1erjuillet 1994, dont les traditions furent transférées à la compa- gnie d’état-major de la 7e Brigade est depuis lors: «Trésignies, nous te suivons. »

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