La découverte du gaz par Jean-Baptiste Van Helmont

La découverte du gaz par Jean-Baptiste Van Helmont

Presque quatre siècles après sa disparition, les biographes continuent à se disputer quant au parcours scientifique de Jean-Baptiste Van Helmont. Les uns le prennent pour un savant de haut vol, n’hésitant pas à l’appeler le Léonard de Vinci bruxellois ; d’autres pour un mystique, un personnage extravagant, certes érudit mais dont on aurait exagéré l’intelligence. Personne ne lui conteste, en revanche, sa plus importante découverte : celle du gaz.

Jean-Baptiste Van Helmont est né à Bruxelles, proba- blement le 12 janvier 1579, d’un père, mort prématu- rément mais qui était auditeur à la Cour des Comptes du Brabant et d’une mère, Marie de Stassart, issue d’une des plus illustres familles nobles de l’endroit. Il aurait donc pu vivre de ses rentes, profiter des avantages offerts à la noblesse de l’époque. Mais, esprit curieux, lecteur assidu, il préféra suivre les cours de l’Université de Louvain. Précoce, il était déjà diplômé de philosophie à l’âge de 17 ans. Bien en Cour, on lui proposa immédiatement une chaire. Il la refusa, estimant avoir encore à apprendre. « Je n’ai guère appris que des mots ; je voudrais arriver aux choses », aurait-il dit. Il se tourna alors vers l’astronomie, l’algèbre, la géométrie et la chirurgie. Pour enrichir ses connaissances en cette dernière matière, il n’hésita pas à consacrer sa fortune à voyager. Atteint par la gale, il eut cependant à découvrir le comportement des médecins sur son propre corps. Ces derniers considérèrent qu’il était victime de la combustion de la bile et de l’état salin du phlegme. Ils utilisèrent dès lors les purgatifs pour combattre le mal, ce qui eut pour effet de l’affaiblir, plutôt que de le soigner. Van Helmont vit dans cette expérience que la médecine était bel et bien une science trompeuse et qu’il n’avait pas à y perdre son temps.

Il s’intéressa aussi à la magie, telle qu’elle était initiée par le père Martin Del Rio. À un point tel qu’on peut considérer qu’elle fit pas mal de dégâts dans son esprit. C’est ce que l’on a appelé son époque mystique, qui faillit d’ailleurs le faire devenir moine capucin, qui le fit croire à la pierre philosophale et tenter de multiples expériences alchimiques. Il affirma ainsi avoir transformé quelques gouttes de mercure en or. Il exerça le magnétisme animal, qui lui valut une convocation devant l’Inquisiteur. Il se serait ainsi vanté de pouvoir prolonger la vie et la santé… mais n’aurait pas été capable de sauver deux de ses propres enfants de la maladie.

Il s’attaqua également aux quatre éléments (l’air, l’eau, la terre et le feu) si chers à Aristote, considérant que ni le feu, ni la terre n’étaient des éléments. Pour lui, la terre était le résultat de la transformation de l’eau. Il démontra son hypothèse en faisant pousser un jeune saule dans une caisse de bois contenant une quantité de terre bien déterminée. Après arrosage, durant cinq ans, avec de l’eau de pluie filtrée sur tamis, il observa que le poids de l’arbre avait augmenté de 76 kilos, la terre n’ayant enregistré aucune variation sensible de poids. Pour lui, l’eau se serait changée en bois et en racines, c’est-à-dire en substances solides qu’on aurait appelées « terre ».

Enfermé dans son laboratoire de Vilvoorde, Jean-Baptiste Van Helmont consacra toute sa vie à ce type d’expériences, prenant de plus en plus ses distances avec l’alchimie au profit d’une chymie naissante. Il découvrit ainsi la présence de suc gastrique dans la digestion ou comment produire de l’acide chlorhydrique, de l’acétate d’ammoniaque ou de l’huile de soufre. Il remarqua aussi que le charbon, par la combustion, exhalait une vapeur, appelée un « esprit » jusqu’alors inconnu. Il va lui donner le nom de « gaz », qui n’est autre qu’une déformation du mot allemand « gasht » ou du néerlandais « geest » signi- fiant « esprit ». Cet « esprit », il va le retrouver un peu partout : dans les eaux de Spa, dans les celliers, dans les mines, dans la fermentation de l’alcool et même dans les produits de la digestion.

Pour faire comprendre l’importance du fruit de sa recherche au commun des mortels, il pratiqua à maintes reprises une expérience qui est entrée dans l’histoire, celle de la bougie : « Eteignez brusquement une bougie à longue mèche ; arrangez-vous de façon à ce que l’air ne soit pas trop agité afin de ne pas éparpiller la fumée qui s’échappera de la chandelle éteinte. Approchez une autre flamme de la fumée qui s’élève ; celle-ci s’enflammera et vous verrez la flamme descendre jusqu’à la mèche et enflammer à nouveau la chandelle préalablement éteinte. »

Ce fut sa plus grande découverte, celle qui le fit passer à l’éternité. Son corps, lui, ne fut pas immortel. Victime d’une violente pleurésie, il refusa de se faire saigner, montrant son hostilité à l’égard de cette technique qui aurait pourtant pu le sauver. Van Helmont était, a-t-on écrit, le plus grand hématophobe qui ait jamais existé. Il s’éteignit à Vilvoorde, le 30 décembre 1644.

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