Charles Niellon, fils de Jacques-Charles et de Madeleine Gilbert, est né à Strasbourg (Bas-Rhin), le 27 Pluviôse An III de la République (15 février 1795). Un de ses oncles est chirurgien-major.
Débuts sous l’Empire
Le 9 janvier 1812, à 17 ans, il s’engage volontairement dans le 23e régiment d’infanterie légère. Il est rapidement envoyé en Catalogne, où il prend part aux combats d’Astorga (juillet-août), de Villafranca (août) et de Mataró (septembre). Jouissant d’une bonne instruction, il devient très rapidement, dès mars 1813, caporal puis caporal-fourrier et sergent, le 1er avril de la même année.
Il est alors envoyé en Allemagne, pour la campagne de Saxe. Avec les 3e et 4e bataillons du 23e léger, sous les ordres du maréchal Marmont, il participe aux batailles de Lützen (2 mai) et de Bautzen (21 et 22 mai). Il est nommé sergent-major le 1er juillet 1813. Il participe ensuite à la bataille de Dresde les 26 et 27 août.
Il combat également à Leipzig (16-18 octobre 1813) où il est blessé d’un coup de baïonnette à la joue droite et fait prisonnier par les Russes. Libéré, il rentre en France, le 1er juin 1814. À 19 ans, il est donc déjà témoin de quatre grandes batailles et vétéran de deux campagnes. Au retour de l’Empereur, le 16 avril 1815, il est incorporé au 2e régiment d’infanterie légère.
Ce régiment fait partie de la 1ère brigade (général Baudouin qui sera tué lors de l’assaut de Goumont) de la 6e division (Prince Jérôme) du 2e corps (Reille) et combat à Ligny et à Mont-Saint-Jean, premier passage en Belgique ! C’est ensuite la débâcle que l’on connaît : l’Empire s’effondre et Niellon déserte le 15 juillet.
Le maréchal Marmont
Le 28 juin 1816, Charles Niellon s’engage à la mairie de Beaune, dans le régiment des hussards du Bas-Rhin, commandé alors par le colonel de Castellane. Là encore, il devient très rapidement brigadier dès le 29 août, maréchal des logis le 13 septembre et maréchal des logis-chef le 11 octobre.
Mais cette aventure est de courte durée et le maréchal des logis-chef Charles Niellon du 4e escadron déserte avec l’un de ses camarades le 2 mai 1817.
Première traversée du désert
Il se réfugie dans le royaume des Pays-Bas (dans la future Belgique), et y exerce plusieurs métiers : marchand de vin, littérateur, acteur, secrétaire d’un officier général en voyage en Russie où il réside à Saint-Pétersbourg pendant huit ans comme précepteur.
Il rentre en France vers 1827-1828. Mais, ses différents projets ayant avorté, il contracte des dettes de jeu et doit quitter le pays en catastrophe après avoir émis plusieurs lettres de change : il se réfugie une nouvelle fois à Bruxelles. Une plainte est déposée contre lui en février 1829 : il est condamné par contumace à dix ans de travaux forcés en septembre 1830 pour faux en écriture.
La gloire à la Révolution
Quand éclate la Révolution belge, il se jette à corps perdu dans l’action. Le 26 août 1830, il commande, comme capitaine élu, le poste de la rue de l’Écuyer, à Bruxelles, et est aide de camp du général d’Hoogvorst, puis adjudant-major de l’état-major général. Il participe activement au retrait de l’armée hollandaise.
Dès le 27 septembre 1830, il est admis dans l’Armée belge et nommé commandant en chef du premier corps franc. Investi du grade de lieutenant-colonel par le gouvernement provisoire, Niellon, à la tête de 600 à 700 hommes, formant le 1er corps franc de l’armée, traverse le Demer, à Aarschot, le 15 octobre 1830.
Arrivée des volontaires liégeois à Bruxelles
Ce corps franc possède quatre pièces de canon de six et deux pièces de montagne. Le but de Niellon est de franchir la Nèthe en aval, puis de tourner et d’inquiéter l’aile gauche de l’armée hollandaise. Bientôt, la colonne principale, sous les ordres de Niellon, est grossie d’un corps franc de volontaires de Louvain, d’un autre d’Aarschot et de quelques volontaires de la Campine, que l’ascendant et patriotique exemple du noble comte Frédéric de Mérode ont entraînés.
Bien que mal armés, mal habillés et mal équipés, ces corps francs sont cependant plein d’ardeur. Le 16 octobre, ils se dirigent directement sur Heist-op-den-Berg, puis sur Lierre, qui sert de point d’appui à l’aile gauche de l’armée royale hollandaise. Lierre se rend sans coup férir, grâce à la lenteur et à l’hésitation du colonel comte de Lens qui commande la 15e Afdeling. La ville ayant ouvert ses portes aux patriotes dès leur apparition, Niellon y fait son entrée dans l’après-midi et s’occupe, du mieux possible, de la mettre en état de défense, aidé dans son travail par le comte de Mérode et les habitants.
Le 29 octobre, le lieutenant-colonel Niellon, dépassant le grade de colonel, est nommé général-major. Appelé d’abord au commandement de la 1ère brigade de la 1ère division, il est investi du commandement de la division des Flandres au mois d’octobre 1831.
Nouveaux ennuis
Mais son passé le rattrape. Très rapidement, la presse orangiste publie de nombreux articles sur sa condamnation par contumace pour faux et usage de faux. Niellon, qui avait déjà réglé ses dettes, découvre avec stupeur cette condamnation et se précipite devant les tribunaux de la Seine en juillet 1832. Les jurés déclarent Niellon non coupable et le président prononce l’acquittement. Dans le même temps, sa désertion du régiment des hussards du Bas-Rhin est amnistiée par l’ordonnance du 28 août 1830. Pourtant, ses ennuis ne sont pas terminés : rentrant en Belgique, il découvre que des lettres anonymes sont adressées à tous les officiers supérieurs français participant au siège d’Anvers. Niellon aurait déserté en 1817, car il allait être accusé de vol et de falsification de comptes. Le coup est rude, car l’information semble d’origine française. Les officiers du 5e hussard participant au siège, pour la plupart anciens camarades de Niellon, rédigent une lettre pour réfuter les accusations de malversations et de vol. Un des officiers donne même sa version de la désertion de Niellon en 1817 : il était compromis dans un complot bonapartiste... Il est même question d’une rivalité amoureuse entre le maréchal des logis-chef Niellon et le colonel de Castellane...
Par souci d’économie, les effectifs militaires de sa division sont réduits (déjà !) : Niellon, considérant qu’il ne peut plus mener à bien sa mission, propose sa démission.
Le général Niellon quitte les cadres de l’armée active le 26 janvier 1833 et est nommé chevalier de l’Ordre de Léopold, le 15 décembre de la même année, à l’occasion de la première promotion de l’Ordre.
Médaille de Sainte-Hélène
Une triste fin de vie
Niellon, en retraite, écrit le livret d’un opéra, se rend en France où il se marie en 1835, s’occupe d’une briqueterie et dépose des brevets. Il obtient la grande naturalisation en Belgique, le 16 mars 1837, mais ne peut réintégrer l’Armée belge. Il est placé en disponibilité, le 19 juin 1842.
Il se met à voyager en Angleterre, en Allemagne, peut-être même en Turquie, gagne beaucoup d’argent et le perd très rapidement dans les casinos.
En 1868, il publie une version très personnelle des événements de 1830 à 1833, un volume intitulé Histoire des événements militaires et des conspirations orangistes de la Révolution de Belgique, de 1830 à 1833.
Il meurt à Laeken, le 26 février 1871, après avoir reçu la médaille de Sainte-Hélène, laissant sa femme et ses cinq enfants sans argent. Après des funérailles grandioses au cimetière de Laeken, le député Du Montier fera voter pour sa veuve une pension viagère de 4000 francs. Une rue de Laeken porte son nom.