« Putains belges » et « Boches du Nord ! »
Le fait de ne pas avoir choisi un camp, d’avoir laissé dire n’importe quoi sur notre défaite, de l’avoir répété et de bien entendu n’avoir rien préparé pour un éventuel repli de nos populations sur le territoire français (centres d’accueil, postes de secours belges, etc.) allait valoir à nombre de nos concitoyens des déboires lors de leur exode vers le Sud. Si pour certains cela se passa bien, pour de nombreux autres ce ne fut pas le cas.
Nous n’étions après tout que des alliés de dernière minute.
Déjà avant la capitulation du 28 mai, l’accueil en France fut loin d’être chaleureux partout. En mai 1940 la chaleur était accablante et certains Français en profitaient pour faire payer un simple verre d’eau.
Après la capitulation, ce fut pire, on nous refusait carrément à boire, en nous conseillant : « Allez boire l’eau du Canal Albert ! ». Les Flamands sont même traités de « Boches du Nord ! », une expression qui devient vite courante.
Dans les rues, les commerces, des affichettes fleurissent, elles sont explicites : « Rien pour les Belges ». Des réfugiés belges sont dans certaines villes rassemblés et gardés à vue par des militaires en armes et traités par les passants, de « traîtres ».
Des femmes belges qui veulent acheter du pain sont agressées dans les files : on leur reproche de vouloir prendre le pain des Français et de n’être que des « putains belges ».
On arrache les décorations à certains de nos militaires, des compatriotes logés chez l’habitant sont expulsés séance tenante, parfois avec en même temps leurs objets personnels, jetés dans la rue. Nos francs belges ne sont plus changés.
L’évêque de Lourdes, lui (dans un geste de miséricorde ?), interdit aux prêtres belges de dire la messe et de confesser, sous peine de péché mortel !