Le prince Albert n'avait pas le droit de régner... ses descendants non plus
Le 2 octobre 1900, Albert, qui n’est encore que prince, convole en justes noces avec Élisabeth, une princesse allemande, nièce de la grande Sissi.
Tout est bien dans le meilleur des carnets mondains, fête, réception, etc. Seul petit « hic » : un article de notre constitution de l’époque (il existe toujours aujourd’hui mais a changé de nombre), le 64 pour être précis, indique qu’aucun acte du roi ne peut être valable politiquement s’il n’est pas en plus signé par un ministre. À cela s’ajoute un autre article de notre constitution (le 60 à l’époque, le 85 actuellement) qui lui nous apprend qu’un prince héritier qui se marierait sans l’accord du roi perdrait son droit de régner. Léopold II ne s’est pas opposé au mariage d’Albert et Élisabeth, que du contraire. En revanche, s’il a donné son autorisation, on attend toujours de la voir contresignée par un ministre. Personne ne l’a jamais vue et pour cause : elle n’existe pas… Un oubli qu’on a caché de peur d’encourir les foudres du monarque ? On ne sait pas. La seule chose que l’on sait c’est que ce mariage de facto empêchait Albert Ier de devenir roi des Belges le 23 décembre 1909. En janvier 1910, la question est abordée par certains quotidiens comme « Le Soir » mais sans trop oser insister. Auguste Beernaert, un homme politique important de l’époque nous l’avons vu, reconnut en parlant de ce mariage qu’il y avait bien eu « une violation théorique de la lettre de la constitution », mais lui aussi laissa filer. Il était plus facile de faire tirer sur des grévistes que de faire une remarque à Léopold II !
Au final, Albert Ier n’étant pas légitime, qu’en est-il de la légitimité de ses successeurs ? Seuls des constitutionnalistes peuvent répondre. Les Wallons trouveront un texte pour dire que ça ne pose pas de problème, les Flamands pour crier à l’usurpation et donner une bonne raison de plus à l’abandon de la Belgique.
En 1909, le 14 décembre, Léopold II signe la loi sur le service militaire obligatoire. Il meurt trois jours plus tard après avoir mis fin (une fois n’est pas coutume) à l’inégalité sociale que constituait le tirage au sort, avec possibilité pour les plus nantis de se payer un remplaçant.
À sa mort, il laisse des hordes d’ouvriers pauvres, illettrés et exploités qui, de plus, sont passés grâce au tirage au sort, dans des casernes bourrées de pauvres types comme eux, qui n’avaient évidemment aucun sentiment patriotique, que du contraire, car on n’aimait pas cet État qui prenait seulement les plus pauvres et ne leur donnait rien ou presque. Il y a donc un pays à deux vitesses et seuls les gens aisés se sentent devenir belges.
C’est ce paradis qui, au regard du monde, dit vouloir aller s’exporter en Afrique.