Le "meiboom"
Pour la Confrérie des Compagnons de Saint-Laurent, dont l’origine remonte à 1311, la Plantation du Meiboom (arbre de Mai ou arbre de Joie) daterait de 1213, année où Bruxelles remporta la victoire sur Louvain. À cette époque, les Bruxellois fréquentaient assidûment les Granges (tavernes) du Marais aux Cygnes, dont la rue du Marais perpétue encore le souvenir. Ce quartier étant alors situé extra-muros, le fisc bruxellois n’avait pas le droit d’y taxer la bière qui y était débitée à flots, le lambic.
Un jour de 1213, une bande de Louvanistes, en querelle avec les Bruxellois à propos des taxes sur la bière, assaillit à l’improviste la Grange Het Cattenhuys, en pleines festivités nuptiales. Les noceurs se retranchèrent dans l’établissement des arbalétriers, ou « Compagnons de Saint-Laurent ». Ces derniers les sauvèrent et, en remerciement pour leur bravoure, le duc Jean III de Brabant leur octroya un statut corporatif. La Gilde de Saint-Laurent reçut par la même occasion le privilège de la Plantation du Meiboom, qui est fixée au 9 août, jour de la Saint-Laurent, mais qui ne se concrétisera pas avant 1308. Lors de la fête annuelle et populaire, sept géants, portés par des buumdroegers (porteurs d’arbre), parcourent les rues de Bruxelles avant d’aller planter l’arbre au coin des rues des Sables et du Marais.
Avant 1940, cette fête connaissait une saveur toute particulière dans ce secteur pittoresque, encore habité par de vrais Bruxellois. À cette époque, il n’avait pas encore été saccagé par la construction de la jonction Nord-Midi et les tours ne l’avaient pas encore envahi.
En souvenir de la rivalité entre Louvain et Bruxelles, la tradition veut que si les Bruxellois n’ont pas réussi à planter le Meiboom avant 17 h, le droit de planter l’arbre doit revenir aux Louvanistes. En 1939, stupeur et tremblement ! L’arbre préparé a été volé par les Louvanistes. La gendarmerie arrivera à les intercepter à l’entrée de Louvain, mais il est trop tard. Fort heureusement, les truculents « bas-fondistes » bruxellois réussissent in extremis à s’en procurer un autre, qui est planté juste avant l’heure cruciale. L’honneur est sauf !
Les cortèges de 1839 et 1849 furent des plus fastueux. S’il n’y en eut pas pendant les deux guerres mondiales, la cérémonie de plantation, elle, n’a jamais été interrompue.
Le 10 août 2008, la tradition a fêté ses sept siècles. L’arbre a été coupé dans le Bois de la Cambre le matin et a été planté avant 17 heures dans le trou fixe permanent, creusé depuis des années à cet effet, dans le quartier des «bas-fonds». L’angoisse est chaque fois que le tronc ne rentre pas dedans !
Si la tradition tend à s’éteindre, parce que les Brusselleirs se raréfient et que fort peu de Bruxellois connaissent encore l’existence même du Meiboom, on a quand même beaucoup bu sur la Grand-Place l’après-midi…