Dieudonné Lambrecht « Le précurseur du renseignement en Belgique »

Dieudonné Lambrecht « Le précurseur du renseignement en Belgique »

Dieudonné naît en région liégeoise, en 1882. Il dirigera plus tard une entreprise industrielle et mènera une vie bourgeoise, avec son épouse. Lorsque la guerre éclate, il décide de se mettre au service de l’armée belge en passant par la Hollande. Là, il est approché par un représentant du Quartier général anglais qui lui propose de retourner en Belgique pour y créer un réseau de renseignements. Ce qu’il accepte.

Pour mener sa mission à bien, il doit s’entourer de collaborateurs fiables. Il obtient le concours de son beau-frère, Oscar Donnay, ainsi que celui de deux pères jésuites, Jean Desonnay et Arthur Dupont dont l’ordre, rappelons-le, a été fondé par Saint Ignace de Loyola, un ancien militaire.

Leur premier souci est de créer des postes d’observation qui consignent tous les trains transitant par Liège, Namur et Jemelle. Lambrecht apporte souvent lui-même les informations en Hollande. Pour passer la frontière, il les note sur des papiers de soie extrêmement fins puis les dissimule dans les boutons creux d’une veste qu’un ami couturier a tout spécialement fabriquée à son intention.

Pendant une année et demie, Dieudonné et son groupe passent sans arrêt de nombreux renseignements. Si les trains militaires qui partent de Liège vers Namur, Bruxelles ou la Flandre sont bien suivis, ceux qui partent vers les Ardennes le sont beaucoup moins alors que c’est de ce côté que sont dirigées une grande partie des forces allemandes. Or on se doute que de ce côté se prépare une grande offensive. Dieudonné se dépêche donc de mettre sur pied un réseau d’observateurs dans la région. Son principal responsable en sera Constant Grandprez de Stavelot. C’est aussi grâce à eux qu’il parviendra à déterminer le nombre de troupes allemandes, qui passent de la Serbie en Flandre via la ligne de Luxembourg. En septembre 1915, il lui sera aussi possible d’évaluer les renforts allemands retirés du front russe pour se rendre en Champagne.

Avant l’attaque sur Verdun Dieudonné suit depuis des semaines les préparatifs des Allemands ; plusieurs fois, il en parle avec angoisse ; mais il y a aussi des préparatifs en Champagne ; où l’offensive se déclenchera-t-elle tout d’abord ? Peu de temps avant le déclenchement des opérations allemandes, Dieudonné apprend de source sûre que le Régiment 132, qui a pour chef l’homme de confiance et bras droit de Mackensen, revenait d’orient, et que là où il se trouverait, là aurait lieu la grande offensive.

Il lui faut donc saisir le passage de ces troupes, les suivre, s’assurer de l’endroit du front où elles seraient acheminées. Et c’est Dieudonné lui-même qui surprend le passage du fameux régiment ! Aussitôt, il monte dans le train et l’accompagne jusqu’à Marloie, c’est-à-dire l’endroit le plus éloigné que ses laissez-passer lui permettent d’atteindre. Après, ce sont d’autres de ces agents qui prennent le relais et découvrent que ce régiment se dirige vers Verdun. Ce qui permettra à Dieudonné de prévenir les Français du secteur dans lequel aurait lieu l’attaque. Et de contribuer ainsi à l’échec d’une des offensives les plus importantes de toute la Première Guerre.

Petit à petit pourtant, le passage vers la Hollande est de plus en plus risqué et à partir de 1916, la frontière est barrée, par une triple haie de fils de fer parcourus par une tension de plusieurs milliers de volts. Franchir cet obstacle est on ne peut plus dangereux. Les passeurs emploient toutes sortes de stratagèmes. 

Avant cela, en février 1916, Dieudonné est arrêté à Liège. Un Judas s’est immiscé dans le réseau et un message venu de Hollande, et destiné au chef du réseau, avait été intercepté par l’occupant. Lambrecht, malgré la torture, ne livra aucun secret ne donna personne, mais écopera de la peine de mort et sera fusillé le 18 avril 1916, à Liège dans l’enceinte du fort de La Chartreuse.

Après la guerre, il sera fait Chevalier de l’Ordre de Léopold avec citation à l’ordre du jour de la Nation. Il recevra également la Médaille de guerre britannique, la Croix de guerre française avec citation à l’ordre du jour du régiment. 

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