Cinq anecdotes sur Bruxelles
De quoi faire fuir les sciants
Vers 1900, les cabarets, réputés pour leurs bières aussi délicieuses que variées, ne manquent pas dans les quartiers typiques de Bruxelles, comme Le Vieux Saint-Pierre et Aux Six Harengs, rue d’Anderlecht, L’Estrille, rue de Rollebeek, au plancher couvert de sable blanc, La Bécasse, à la rue Tabora, La Porte Rouge, place Sainte-Catherine, fréquenté par les fonctionnaires et les intellectuels, La Chaîne d’Or, dans la rue étroite des Six-Jetons, ou encore Le Duc Jean, dans le quartier de la Putterie. Des femmes colportent de table en table des mets divers présentés dans des paniers : oeufs durs, noix, noisettes, crevettes, crabes ou saucisson, bref, de quoi attiser la soif. Au comptoir, quand un client commence à importuner ses voisins avec ses histoires, le patron fait entrer en action son zoegemanneke, « le petit scieur », un petit bonhomme en fer noir qui se balance et scie jusqu’à faire taire tout sciant !
La lune, nouvel espace d’exposition
Le sculpteur Paul Van Hoeydonck, né à Bruxelles en 1927, a étudié à Anvers. L’un de ses thèmes favoris à travers son art est le monde extra-terrestre. Le 2 août 1971, pour la première fois, une statuette, née de ses mains, a atterri sur la lune. Appelée Fallen Astronaut, elle a été déposée par l’équipage d’Apollo 15 et son capitaine David Scott dans un cratère lunaire près de la base de Hadley Rille, à sept mètres au nord du véhicule lunaire. Comme l’évoque son nom, elle honore la mémoire des astronautes qui ont perdu la vie dans l’espace depuis les débuts, en 1957, soit 14 en tout. Vu les contraintes du voyage, la statue est petite (8,5 x 2 x 1,5 cm) et légère (en aluminium). Il n’en reste pas moins vrai qu’elle constitue la seule oeuvre d’art exposée sur la lune et qu’elle est belge.
Bruxelles, championne d’éditions pirates
Au début du XIXe siècle, les éditeurs bruxellois profitèrent de l’absence de législation internationale en matière de droits d’auteur pour se lancer dans un commerce juteux d’éditions pirates. Dès qu’il sortait de chez un éditeur parisien, un livre était réédité par un éditeur bruxellois, à un prix beaucoup plus attractif et dans un format plus pratique. Ainsi, un livre de 24 francs en France en valait 3 à Bruxelles. Il n’est dès lors pas étonnant que Bruxelles détenait le monopole du livre de langue française dans le monde. Il prit fin lorsque, le 22 août 1852, fut signée entre la France et la Belgique la « Convention pour la garantie réciproque de la propriété littéraire et artistique », qui présida à la disparition d’un grand nombre de maisons d’édition bruxelloises.
Encore un petit tour de piste ?
À Bruxelles, en juillet 1931, fut organisé un marathon de la danse, idée venue des Etats-Unis. L’épreuve pouvait rapporter des gains non négligeables. Le couple vainqueur de cette compétition resta en piste 751 heures et 30 minutes, soit 31 jours !
Incendie bien arrosé
En 1847, Bernard de Smedt rapporte cette savoureuse anecdote survenue pendant le bombardement de 1695 :
« Un bourgeois qui avait dû fuir sa maison située près de Saint-Nicolas et s’était réfugié comme tant d’autres dans le parc, suivait des yeux, avec quelque anxiété, la direction des bombes qui portaient spécialement dans son quartier la destruction et l’incendie. C’est qu’entre autres objets qu’il n’avait pu sauver du désastre, ce bourgeois regrettait surtout une tonne de vieille bière qu’il s’était promis tant de joie à déguster. Enfin, prenant une résolution subite, notre homme se saisit d’un immense cruchon et annonce à ses voisins son dessein d’aller le remplir de la précieuse bière qu’il gardait en dépôt. Les objections se lèvent contre ce projet téméraire et puéril, mais rien ne l’arrête. Il part, emportant son cruchon. Il arrive à sa demeure, déjà toute dégradée par l’artillerie française ; il en gémit mais ne descend pas moins à la cave, où il trouve quelque consolation… L’immense cruchon s’emplit ; à regret, notre bourgeois rebouche le tonneau et se prépare à partir, quand une bombe énorme traverse le plancher et la maçonnerie. Le sang-froid n’abandonne pas le bourgeois. Une mort horrible l’attend, mais la mèche doit brûler encore quelque peu pour enflammer le projectile. Alors, sans hésiter, notre homme, renversant son précieux nectar, éteint la mèche fatale. Plus tard, on le vit rentrer dans le parc avec sa rustique amphore qui débordait. »