Papa Merx « Le doyen »

Papa Merx « Le doyen »

Pierre Merx, né à Liège le 27 janvier 1849, est entré dans l’Histoire sur le tard. En 1914, il a déjà 65 ans quand les Allemands envahissent la Belgique. On ne sait pas par quel mystère, le brave sexagénaire réussit à se faire engager au 1er Régiment de volontaires. Autorité militaire et médecin n’ont-ils vu que du feu quant à son âge ou ont-ils été subjuguées par l’ardeur et la robustesse de ce candidat peu ordinaire ? Ou bien alors, c’est son passé militaire qui a joué en sa faveur: pendant la guerre franco-prussienne de 1870, il était sous-officier de cavalerie, préposé à la surveillance de la frontière.

La raison de son engagement, pour certains, est toujours restée énigmatique. Son fils, s’étant réfugié aux Pays-Bas, ne pouvait plus participer au conflit. Pierre aurait dit : « Puisque mon fils ne peut pas combattre, il n’est pas dit qu’il n’y aura pas un Merx pour le faire. » Une autre version rapporte que Pierre, veuf depuis quelques années, avait été obligé de vivre chez une de ses filles. S’engager, c’était l’occasion rêvée pour lui de reprendre un peu d’indépendance !

 Pierre était un vrai patriote. Parmi les volontaires, il va se faire remarquer non seulement parce qu’il en est le doyen, et de loin, mais surtout par son courage exceptionnel.

Une fois sous l’uniforme, son surnom sera vite trouvé :  «Papa Merx». Les officiers veulent bien entendu, et c’est normal, l’affecter à l’arrière, au ravitaillement. C’est mal connaître l’ami Pierre qui immédiatement rue dans les brancards. Il est vieux, oui, et alors, il porte l’uniforme comme les autres et c’est le service actif qu’il exige, il le dit haut et fort: «Je ne suis pas venu pour conduire matériaux et blessés ; je veux me battre. »

Quelque temps plus tard, la hiérarchie, certainement par respect, veut lui rendre le grade qu’il avait auparavant, mais là en- core, le vieux Pierre, Papa Merx, ne l’entend pas de cette oreille : il est dans une nouvelle vie militaire, il recommence à zéro et c’est sur le champ de bataille qu’il veut les gagner ses galons.

Parce qu’il s’est montré, sans doute, très persuasif, il n’est non seulement pas affecté chez les « planqués » de l’arrière, mais versé dans une unité de première ligne, une des plus dangereuses, car il s’agit des « patrouilleurs ».

Il ne faut pas attendre la fin du premier hiver au front pour qu’il soit nommé caporal le 5 mars 1915, à cause de la bravoure dont il fait preuve. Peu de temps après, il est d’ailleurs fait Chevalier de l’Ordre de Léopold II.

Un de ses camarades raconte ce qui s’est passé et comment Pierre s’est distingué : « En février 1915, la 3e D.A est affectée à la garde du secteur de Dixmude, secteur particulièrement chahuté. Après une nuit d’un bombardement intense et violent, un petit poste s’est trouvé en danger. Les deux sentinelles – les frères Sertin – sont menacées. Le caporal Cousin et Papa Merx volent à leur secours, dispersent une patrouille allemande et les libèrent. Non content de ce fait d’armes, Pierre s’en va seul réoccuper le trou des deux frères. Impossible pour lui de rentrer le lendemain, tellement le bombardement violent fait rage. Ce n’est que deux jours plus tard qu’il pourra, enfin, regagner ses lignes. »

Pierre entrait ainsi dans l’Histoire de la Division après être entré dans celle de l’armée. Mais il ne lui faut pas attendre longtemps pour s’illustrer à nouveau. Le 24 mars 1915, il est à la tête d’une patrouille, juste avant l’attaque allemande de la ferme « Den To- ren ». Un de ses hommes est tué, deux autres sont blessés, mais Pierre ne regagne sa compagnie qu’après avoir recueilli les renseignements demandés. Suite à ces deux faits d’armes et à son comportement aussi courageux qu’exceptionnel, il est nommé sergent le 12 juin 1915.

En 1917, on lui propose à nouveau un poste à l’arrière, avec en plus le grade d’adjudant. . Pierre refuse encore une fois : tant qu’il y aura un front, il y restera.

Pierre Merx n’est pas pour autant un « va-t-en-guerre » sanguinaire, c’est simplement un homme courageux qui veut faire le don de sa personne à son pays. Papa Merx, nous venons le voir, a été le plus vieux soldat belge à faire la Grande Guerre. Et de quelle manière !

 

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